Projet Boost : Comment Air France peut-elle s’en sortir ?


Comment faire entrer un carré dans un rond, voilà le défi de la direction d’Air France en lançant le projet Boost. Au fond cette affaire n’est compliquée que par les mauvaises habitudes sociales subies par la compagnie depuis plusieurs décennies.

Rien ne peut se faire sans l’aval des pilotes et on se demande bien pourquoi. D’autant plus que ces derniers ne montrent à aucun moment le souci de la prospérité de leur entreprise mais uniquement le maintien, voire même l’amélioration de leurs privilèges.

L’analyse de la direction est pertinente. Si la compagnie nationale veut éviter une forte attrition, elle doit être capable de couvrir tous les segments de produit, depuis le « low cost », jusqu’au transport de luxe. C’est ce qui est fait sauf pour le « low cost » long courrier. Il est par ailleurs fortement attaqué sur le court-courrier lequel est devenu déficitaire après avoir été la vache à lait de l’entreprise.

On ne peut pas reprocher au management sa vision à partir du moment où la décision stratégique de croissance a été prise. On ne peut pas lui reprocher non plus le choix de créer une nouvelle compagnie plus souple, moins onéreuse à exploiter, capable de minimiser les pertes sur les lignes très déficitaires, car trop fortement concurrencées.

Mais la réponse n’est pas très claire tout au moins aux yeux d’un observateur extérieur. Boost est-elle une vraie nouvelle compagnie ? Fabrique- t-elle un produit « low cost » ou un produit traditionnel ? Quelle sera sa capacité à faire concurrence aux opérateurs dont les charges d’exploitation sont structurellement inférieures à celles de Boost ?

Comment utiliser la belle image d’Air France en mettant sur le marché une compagnie qui ne porte pas son nom ?

Et puis comment arriver à faire baisser les coûts de l’ordre de 15 % à 18 % comme annoncé en utilisant des Airbus 340 pour la phase de démarrage long courrier, alors que de l’avis général, cet appareil est très onéreux à opérer ?

Je sais bien qu’il est facile de porter des interrogations depuis l’extérieur sans forcément avoir toutes les informations.

Je note cependant que la concurrence va rester aussi forte sur les lignes envisagées et que pour rentabiliser les opérations de Boost, il faudra plus que les 15 % d’économies. Il sera nécessaire de regagner une clientèle qui est partie vers les autres transporteurs car elle trouvait un meilleur rapport qualité/prix.

Bon, est-ce une raison pour ne pas essayer ? Certainement pas. Je dirais au contraire que le projet devrait entraîner l’adhésion enthousiaste du personnel qui pourrait à tout le moins considérer les efforts et l’imagination déployés par la direction pour sortir le groupe Air France/KLM par le haut de la situation difficile dans lequel il se trouve.

Seulement il faudrait pour cela que les responsables de l’entreprise ne soient pas condamnés à devoir discuter, je dirais même marchander avec telle ou telle catégorie de personnel défendue par des syndicats dont le but est uniquement de défendre des intérêts catégoriels et ce au détriment de ceux de la compagnie.

Pour tout dire, je trouve un peu insupportable un mode de gestion qui s’apparente à celui des Soviets dans un monde manifestement si éloigné de ce mode de pensée.

Cela fait des mois que le projet est sur la table et qu’il n’avance pas, tout simplement parce que des pilotes, qui ont bien accepté de voir les navigants commerciaux employés avec des salaires et avantages très réduits, refusent la mise en route de la nouvelle compagnie tant qu’ils n’auront pas obtenu entière satisfaction, ce qui rend impossible les baisses de charges nécessaires.

Ce ne serait pas la première fois que des intérêts purement catégoriels entrainent la mort des entreprises de transport aérien. Les exemples foisonnent mais manifestement ils ne servent à rien.

Jean Marc Janaillac a bien raison de rappeler que sans avancée significative, l’entreprise est vouée à reculer fortement. Le statut quo n’est plus envisageable.

Si la solution proposée par la création de Boost est jugée inadéquate par les pilotes, pourquoi n’en proposent-t- ils pas une autre meilleure ? L’obstruction systématique, ça suffit.

Jean Louis Baroux





    3 commentaires pour “Projet Boost : Comment Air France peut-elle s’en sortir ?

    1. Les pilotes sont pour Boost (référendum)
      La direction veut économiser sur les Pnc, pas les pilotes qui sont solidaires de la caisse de retraite qu’ils partagent…
      Ils sont incontournables car ils sont les jambes et les bras de cetête Cie (comme partout ailleurs)
      Boost ne sera pas une lowcost, et les lignes seront en ventes sur AFKL.
      La seule vraie question c’est comment en économisant si peu on tire des tarifs à -18%, c’est peu probable initialement et les pilotes ont raison de border juridiquement une exploitation qui pourrait rapidement vider AF de sa substance. En revanche c’est vraisemblablement la seule manière de réformer cette boîte d’un autre âge dans sa structure actuelle.

    2. on est en train d’assister à l’assassinat de Alitalia par les categories du personnel les plus nanties….il faudrait se poser la question du pourquois ces categories n’ont pas un sense de responsabilité sociale alors que elles sont beneficieres d’avantage non comparables à d’autres group sociaux.
      ce phenomene est recourrant chez la plus part de legacy airlines…il devrait y avoir un probleme psicologique de group ( ou de metier) .Voila un sujet que une Think Tank pourrait debattre.

    3. Cher Monsieur Baroux,

      Il y a, désormais bien longtemps, M. Mitterrand disait à propos du chômage : «On a tout essayé et rien n’a jamais marché».
      On pourrait dire à peu près la même chose pour Air France et, plus généralement, pour le transport aérien français. Pourtant, il y a au moins une option qui n’a pas été essayée : le PIAF.
      Il est vrai qu’il faut à la fois un minimum d’imagination, pas d’œillères, de la lucidité et surtout beaucoup de courage.
      Ceux qui ont essayé ne le regrettent pas, ils se portent TRES BIEN, les chiffres sont là pour le démontrer.

      Cordialement

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