Tourisme en Tunisie, D’abord une question de positionnement


Entre les autorités du tourisme de Tunisie et les professionnels français, l’heure est assurément à la franchise. Et les problèmes à régler pour envisager une relance efficace de la destination semblent aussi tout à fait connus.

bertrand FiguierEn quelques mots d’ailleurs, Jean-François Rial, le patron de Voyageurs du Monde, et Folco Aloisi, celui de Promocacances, les ont résumés dans toute leur crudité, donnant ainsi le ton de la réunion organisée lundi dernier à Tunis par Mme la Ministre, Selma Elloumi-Rekik.

La propreté des sites et des plages, la peur des Européens vis-à-vis des pays musulmans, l’obsolescence des infrastructures et la faiblesse des investissements seraient ainsi les principaux verrous à faire sauter au plus vite si l’on veut revoir le tourisme tunisien en pleine forme.

Pourtant la franchise ne peut pas tout, même quand elle vient d’amis fidèles et sincères. Il faut aussi un projet, une vision dans laquelle inscrire son action.

En sortant de cette réunion, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’en ajoutant la tendance baissière de la fréquentation au constat qui a été posé sans détours, le tourisme tunisien doit repartir du début.

Quel tourisme la Tunisie veut-elle offrir ? Non seulement aux Français, ses clients historiques, mais aux clients du monde entier, Chinois, Japonais ou qui l’on veut ?

Parce que son économie dépend beaucoup du tourisme, son emploi en particulier, et que le tourisme mondial, quoi qu’il se passe dans le monde depuis 10 ans au moins, affiche une croissance régulière de 4 à 5 %.

De ce point de vue, les autorités et les professionnels tunisiens du tourisme ne feront pas l’économie d’une analyse profonde et d’un choix stratégique à long terme sur le positionnement de la destination.

Quelle offre touristique faut-il pour la Tunisie, alors que durant la longue crise qu’elle traverse, d’autres destinations ont occupé largement et durablement son marché traditionnel, essentiellement bâti sur le volume et le 1er prix.

À cette question, seuls les Tunisiens eux-mêmes peuvent répondre ; en écoutant les conseils avisés de leurs amis les plus sûrs, sans doute, mais en fixant eux-mêmes le cap.

Il ne s’agit pas aujourd’hui de rechercher une fréquentation qui rapporte peu et dont on voit aujourd’hui le coût faramineux alors qu’elle vient à manquer. À court terme ce serait s’enfoncer encore un peu plus, sans préparer correctement la cible à long terme, une clientèle qui dépense plus.

Il ne s’agit pas non plus de communication.

D’abord, parce qu’on ne sait même pas quoi vendre, ni comment le vendre ; et ce n’est pas un hasard si cela fait des années que la Tunisie cherche à diversifier son offre sans y parvenir tellement son image balnéaire 1er prix lui colle à la peau.

De plus le terrorisme islamique a brouillé son image et la crise économique a largement érodé sa clientèle cible.

Ensuite, parce que l’Islam, en France comme dans beaucoup de pays européens, lui pose un double problème, extrêmement difficile à manier, et plus encore à résoudre.

Sur place, Jean-François Rial le disait très bien, le terrorisme islamique fait peur aux clients potentiels de la destination ; mais ce n’est pas tout, car il faut aussi compter avec l’agacement que de plus en plus d’européens éprouvent devant les « revendications » intempestives des musulmans qui vivent sur leur sol.

De fait, la destination se trouve prise en sandwich sur cette question, et la communication qu’il faudrait mettre en place pour compenser, voire pour la faire «oublier», demanderait beaucoup trop de temps et des moyens colossaux.

Enfin, il ne s’agit pas non plus de politiques de prix ou de promotion. C’est visiblement ce qui a brisé l’investissement régulier dans le tourisme tunisien.

S’entêter dans cette voix ne ramènera ni les clients ni les investisseurs dont la Tunisie a grand besoin pour réussir le plus rapidement possible la remise à niveau de ses infrastructures.

La question prioritaire est bien de rebâtir un vrai positionnement pour la Tunisie.

La destination veut-elle devenir le Macao ou le Las Végas, le Hawaï ou l’île Maurice de la Méditerranée ? Veut-elle devenir le Malte ou la Riviera du Maghreb ?

Je n’en sais rien… ce que je sais en revanche, c’est que pour mobiliser les énergies, celle des populations, celle des professionnels tunisiens et européens ; pour retrouver la liberté de bâtir une tarification nouvelle, et plus élevée bien sûr ; pour préparer l’avenir en gérant au mieux les besoins immédiats, il faut se décider vite et clairement, quelque que soit le projet du pays.

Les gens du secteur et les investisseurs potentiels ont surtout besoin d’un cap général, d’une vision globale, pas seulement d’ajustements fiscaux ou administratifs, et les destinations concurrentes ne vont pas mettre un couvercle sur leurs projets par solidarité avec la Tunisie.

À cet égard, la réunion de lundi dernier me semble plutôt encourageante. On se parle franchement même si personne ne sait vraiment comment répondre aux enjeux qui se bousculent et dont la priorisation est effectivement très difficile à trancher.

Seuls les Tunisiens peuvent en décider et, si l’état semble encore trop fragile pour fixer un cap qui s’impose aux intérêts ponctuels et privés, on peut espérer que la volonté politique affichée par Madame Elloumi-Rekik est bien réelle et qu’elle sera suffisamment forte pour entraîner tout le secteur derrière elle.

La rumeur explique son arrivée au Ministère du Tourisme et de l’Artisanat par son origine familiale, suffisamment opulente pour contribuer à l’élection du Président Tunisien.

On peut aussi lui accorder un peu de crédibilité personnelle et se souvenir que cette femme d’affaires reconnue a tout abandonné pour se consacrer entièrement au relèvement politique de son pays, dès le début de la Révolution du Jasmin.

Il semble même qu’elle ait toujours été en première ligne, dans la rue, en particulier lorsque les musulmans envisageaient d’installer la charia au cœur de la nouvelle constitution tunisienne.
Bertrand Figuier





    2 commentaires pour “Tourisme en Tunisie, D’abord une question de positionnement

    1. Certains hôtels en Tunisie n’aime pas les personnes seules (single), le prix du supplément est exagéré par exemple le Rym Beach à Djerba, même en fin d’année, le suppl. single est très élevé ! Il y a d »autres destinations que la Tunisie ne l’oubliez pas ! Si vous chassez le touriste, il ne reviendra plus !
      Le soleil brille aussi ailleurs, pas uniquement en Tunisie !

    2. Alors que le tourisme ne se porte pas bien en Tunisie, il y a une taxe de 30 dinars par personne pour sortir du pays, depuis le 1er octobre 2014. Cette somme je l’ai déduite des pourboires donné habituellement, je n’ai rien perdu, mais bien les serveurs, la femme de chambre, le barman,…J’ai reporté cette taxe sur le personnel qui paie en somme pour moi ! la Tunisie n’a rien gagné d’avoir engendrée cette taxe.

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