Responsabilité de plein droit : non bis in idem


Au début des années 80, le boxeur panaméen Roberto Duran abandonna avant la limite d’un combat particulièrement âpre face à Ray Suger Leonard. Epuisé, il se retourna vers l’arbitre et déclara « No màs » – plus rien. C’était fini pour le champion déchu. La parabole pourrait s’appliquer au combat pour ou contre, c’est selon, la remise en place de la responsabilité de plein droit à la charge des vendeurs de voyages forfaitaires.

M. Bruno Lemaire, tout récemment conforté à son poste au gouvernement, veut conserver ce statut discriminatoire en dépit des dispositions très claires de la communauté européenne.

Bien-sûr, les icônes de la profession montent au créneau et poussent des cris d’orfraies. Ils menacent de saisir le Conseil d’Etat. « Si vis pacem para bellum » – si tu veux la paix, prépare la guerre.

Nos gouvernants doivent être terrorisés face à une telle menace. Alors, je propose que pour une fois nos institutionnels cessent de communiquer et essayent d’agir efficacement.

Les arguments en faveur de la profession sont aussi réels que légaux. En attendant de pouvoir déposer ce recours, il faut agir, mobiliser l’ensemble de la profession. Car, tout le monde semble d’accord. C’est sur le ring que se gagnent de tels combats.

Ce serait une opportunité historique qui pourrait aplanir bien des clivages qui sapent la profession (les professions) depuis bien trop longtemps. Il faut que tous les agents de voyages montrent un front uni qui aille au-delà des petites phrases caustiques et assassines.

Pour défendre notre point de vue. Au-delà des mots, des actes concrets.

Il y a une part d’utopie dans mes propos. Mais les exemples de rêves improbables qui ont eu des résultats bien réels sont légion. De l’ « I have a dream » de Martin Luther King Jr, à «Yes we can» de Barack Obama. Parfois, il suffit d’y croire et surtout ne pas arrêter le combat avant qu’il soit terminé.

Nous allons parler concrètement. La Directive européenne ne fait nullement mention de responsabilité de plein droit.

Qu’avec la France, seuls le Danemark et le Portugal l’appliquent actuellement. Il serait intéressant de connaitre la position que prendront ces pays lors de la transposition de la nouvelle Directive.

Le 1 er juillet 2018, les décrets modifiant et modernisant les règles relatives à la vente de voyages forfaitaires seront en vigueur. Un dépoussiérage qui s'imposait du fait des divers changements sociétaux.

Mais l’exception française a encore frappé. Benjamin Griveaux, le tout nouveau secrétaire d’État au tourisme et à la consommation qui cherche sans doute un espace de communication. À opposé à l’ensemble de la profession une brutale fin de non-recevoir. Le fait du prince. La responsabilité de plein droit restera applicable en France.

C’est ignorer que la Directive européenne (UE) 2015 établit sous son Article 4 – Niveau d’harmonisation « Sauf si la présente directive en dispose autrement, les États membres s’abstiennent de maintenir ou d’introduire, dans leur droit national, des dispositions s’écartant de celles fixées par la présente directive, notamment des dispositions plus strictes ou plus souples visant à assurer un niveau différent de protection des voyageurs. »

Électoralement parlant, la protection des millions de consommateurs pèse infiniment plus lourd que les intérêts corporatistes de dizaines de milliers d’agents de voyages. C’est en tout cas ce que cherchent à nous imposer brutalement les politiques.

Une transposition de l’adage de Colbert : «L’art de l’imposition consiste à plumer l’oie pour obtenir le plus possible de plumes avec le moins possible de cris.»

Moi, à mon petit niveau j’aimerais savoir ce que pense M. Bruno Lemaire de l’escroquerie collective perpétrée par près de 800 touristes anglais cupides. Des opportunistes démarchés devant leurs hôtels par une cohorte d’avocats britanniques qui leur donnent des conseils sur la meilleure manière d’obtenir de confortables indemnités sur le dos des professionnels espagnols.

Sachez, M. Bruno Lemaire, que le monde du tourisme n’est pas manichéen. Il n’y a pas d’un côté les méchants agents de voyages qui abusent de la crédulité des consommateurs et de l’autre des gentils voyageurs désemparés et livrés à eux-mêmes qui n’ont pour seule défense que leur naïveté.

Alors chiche, si on essayait de faire respecter nos droits. Un peu d’audace ne serait pas inutile pour une fois. Pour ne jamais dire « no màs.»

Nous pourrions par exemple affirmer que l’ensemble de la profession pourrait instituer une mutualisation du coût des réclamations. En intégrant dans le prix des forfaits une somme permettant d’assumer le coût des réclamations survenant du fait de la responsabilité de plein droit. Un fonds géré par une autorité indépendante paritaire à la manière des fonds destinés à la formation professionnelle.

Une autre utopie pour certains. Mais, quand on aime, on ne compte pas.

En tout cas, ce serait une réponse métier qui de plus est parfaitement légale l’état ne se prive pas de percevoir des taxes sur la billetterie.

Votre dévoué,
Lucius Maximus





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