Isobloc et autres autocaracolages du passé…


Photo JP 2A l’origine, Joseph Besset né à Vanosc en Ardèche apprend le métier de charron dans son village natal dès l’âge de 15 ans, puis développe à partir de 1926 un atelier de charronnage-carrosserie à Annonay sur le site actuel de l’usine IRISBUS.

Le charronnage de l’époque, lié au travail combiné du fer et du bois, est intimement lié aux transports.

Spécialisé dans la carrosserie, Joseph Besset fut le concepteur du fameux autocar ISOBLOC, premier car européen de tourisme à structure autoportante issue des techniques de l’aviation avec position du moteur sur l’arrière.

Cette technique d’avant-garde, il l’a découverte aux Etats-Unis et s’est emparé du brevet pour instaurer en France cette conception révolutionnaire.

C’est lui qui inventa ce type de carrosserie, fonda l’entreprise, et fut à l’origine de la première carrosserie à Annonay en 1913 où sont fêtés cette année les 100 ans de l’entreprise Iveco Bus.

C’est par plus de quatre chemins que l’ISO construit par Jo Besset finit par atterrir chez Alain Gros, éminent transporteur de Seine-et-Marne… Purée, il a dû en faire des tours et des détours… Il en a accueilli des popotins sur ses cuirs… il en a baladé des gosses vers leurs colos, des footeux vers les stades, des jeunes mariés vers leur… zut… vers quoi, exactement ?

Pour les amateurs de véhicules anciens, le rendez-vous incontournable se situe à Nangis en Seine et Marne, où il ne faut pas manquer de faire appel à l’amabilité d’Alain Gros pour découvrir Son Conservatoire de l’Autocar…

Chez lui, là dedans… y’a du cœur, du bouillon, de la couleur et du patiné… çà vit, çà fume, çà pète et çà fleure bon l’autocar d’antan…! Pas d’erreur, pour Alain Gros, c’est pas de l’Amour, c’est même plus que de la Passion… c’est de la rage !

Dans ses bâtiments, rien de comparable à la rigidité d’un musée, où sont définitivement figés des objets qui ne vivent plus et que l’on découvre en silence… Ici, les merveilles qui nous entourent continuent à vivre, on peut même les croiser sur les routes, à l’occasion de tournages.

Tenez, regardez, celui-ci vêtu de sa carrosserie originale, avec son plancher en bois, il date de 1928… c’est un Citroën LU23 à essence et qui bien sûr roule encore !
Essentiellement pour faire son cinéma… ! T’as vu la climatisation de l’époque ? C’est le pare-brise que l’on relève, pas mal, non ?

Allez, on passe à autre chose… ce Delahaye, par exemple, ça évoque plein de choses aux amoureux des vieilles bagnoles… Et pourtant, tu savais même pas que Delahaye fabriquait également des autocars et des camions et que les châssis de camions étaient carrossés pour les transformer en autocars.

Celui-là, ce spécimen que vous avez sous le nez, il était en exploitation dans les Pyrénées, dans la région de Lourdes… Et bien le miracle, c’est qu’il soit remis dans un si bel état au Conservatoire… lequel l’entretien, l’astique et le bichonne comme s’il avait transporté la Sainte Vierge !

Faut voir l’alignement impeccable de ces merveilles anciennes : Chausson, Iso, Panhard, Lafly, Saurer, Verney, Berliet ou tant d’autres… autant de matériel de ligne régulière que de véhicules de tourisme, dans lesquels les gens étaient heureux de voyager, même si les lames de ressorts des suspensions de ce temps étaient peu respectueuses de leurs arrière trains…

Tu fais le tour avec un amusement teinté de surprise pour découvrir quelque part le grand nez du car de la Saint Quentinoise, qui date de quelle année? d’avant 1950, forcément…

Sur celui-ci, modèle spécialement dédié aux excursions à cette époque, tu remarques le toit ouvrant, la petitesse des baies vitrées, les petits pare-soleil, les minuscules essuies glaces…

Pour la majorité des modèles qui ont précédé l’Iso, les capots des moteurs étaient placés à côté du conducteur…endroit tout justement prévus pour accueillir les fesses des belles qui désiraient tailler la bavette avec l’artiste baraqué posté au volant !

Dans cet autre encore, si tu t’installes sur le siège conducteur, tu es totalement désaxé par rapport au volant, ce qui prouve le châssis de camion d’origine et témoigne des contraintes du carrossier, dans l’impossibilité d’éviter ce déport…

Il y avait sûrement du torticolis dans l’air… du déplacement de vertèbres, de l’épaule maltraitée, car pas de direction assistée, juste du muscle et de l’huile de coude, mon pote et derrière le volant, il y avait des mecs… des vrais… pas des lopettes, et admirés avec çà !

Alain Gros vous expliquera que l’on trouve encore quelques personnes capables de restaurer, de formater, de réparer, de décabosser ces bijoux… mais ces orfèvres se font hélas de plus en plus rares. Il y a ici une petite équipe de compagnons en casquette pour protéger leurs tempes grises… des retraités férus qui viennent l’aider.

Ils ont la compétence, l’expérience et l’ancienneté qui leur permettent de vivre en harmonie avec des véhicules anciens. Tu les verrais quand ils tirent sur le démarreur et que çà pétarade… !

Mais tout çà laisse augurer que par la force des choses, des centaines et des centaines de cars auront disparu dans quelques années. De moins en moins de passionnés auront les moyens de rénover les véhicules. Les quelques tournages et quelques expositions ne sont pas suffisants pour compenser des prix de restauration extrêmement élevés.

Ta passion, ta volonté d’offrir et de partager de belles pages de l’histoire du transport de voyageurs en France est précieuse à toute notre profession… Tous reconnaissent ta modestie… ton application et ton courage !

Tu peux être fier, Alain, car si jamais tu n’étais pas tout à fait unique, peu s’en faudrait !

(A suivre)

Jean Pierre Michel





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