Mais pour qui donc le transport aérien est-il organisé ?
5 mai 2025 Jean-Louis Baroux Aucun commentaire À la une France 3669 vues
Les créateurs du transport aérien moderne sont soit déjà morts, soit dans la dernière partie de leur vie. Ils ont beaucoup de peine à se reconnaître dans son état actuel. Jusqu’à la fin des années 1970 c’est-à-dire au cours des 35 premières années de cette activité née à la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, il était synonyme de luxe.
Il faut dire que son accès coûtait cher. Finalement les clients payaient pour avoir un confort somme toute sommaire si on le compare à l’état actuel, mais ils avaient l’impression de se déconnecter de la masse populaire condamnée à voir décoller les avions depuis les terrasses des aéroports.
Cela a bien changé et si les fondamentaux : la sécurité, la fiabilité et la recherche d’un technique toujours meilleure sont restés des constantes, il n’en est pas de même pour sa consommation.
L’arrivée des « low costs » a tout changé et d’abord la clientèle et la manière de consommer le transport aérien. Cela ne va pas sans certaines contradictions.
La première tient à la contrainte écologique. La sauvegarde de la planète est devenu une préoccupation majeure des jeunes générations légitimement inquiètes de son état en dégradation régulière.
Mais cette même tranche de clientèle se précipite dans les avions pour un oui ou un non, en tous cas pour des considérations personnelles et non professionnelles car les prix sont devenus tellement bas que l’on peut à loisir s’offrir des déplacements de quelques heures sans grever son budget.
Or cette accélération de la demande est en elle-même productrice de CO² contre lequel les jeunes générations tentent de lutter.
Pour résoudre le délicat problème du coût réel du transport aérien, car il faut bien tout de même payer les avions et bon an, mal an, il est de 500.000 € le siège sur lequel s’assoient les passagers qui paient moins de 100 € un aller-retour en moyen-courrier, les clients acceptent une forte dégradation de leur confort.
Les appareils sont densifiés au-delà du raisonnable et les services réduits à leur plus simple expression.
Le temps de demi-tour des appareils est tellement réduit que les vols de fin de journée sont régulièrement en retard.
On oblige les passagers à patienter de longues minutes debout dans les passerelles pour accélérer les embarquements.
Et finalement les compagnies ont sous-traité à leurs clients un grand nombre de tâches administratives, telles que les achats de billets, l’émission des cartes d’embarquement, l’enregistrement des bagages et j’en passe certainement.
Ainsi le transport aérien moderne s’est éloigné de ce qui a fait sa réputation, c’est-à-dire un certain prestige et pour tout dire un certain art de vivre réservé alors à une minorité d’individus.
Chaque génération impose sa manière de vivre aux autres.
La classe active actuelle, disons celle qui a entre 20 et 50 ans, a imposé sa manière de fonctionner aux générations précédentes, celles qui ont créé le transport aérien.
Nombre de clients plus âgés ne sont pas familiers avec la digitalisation qui leur est imposée, d’ailleurs beaucoup de personnes d’un certain âge ne disposent pas d’un ordinateur ou d’un smartphone de dernière génération.
Elles sont de plus totalement désarmées devant les questions posées souvent dans un langage ésotérique tout au moins pour elles.
Il est dommage qu’une tranche de population qui dispose de moyens économiques largement suffisants ne puisse pas trouver une qualité de produits et de services qu’elle serait largement prête à payer, tout simplement parce que ces services n’existent pas.
Je note cependant une tendance à retrouver un certain luxe dans les compagnies aériennes traditionnelles qui cherchent ainsi à se démarquer des « low costs » car elles sont dans l’incapacité à équilibrer leurs comptes en utilisant la gamme tarifaire de leurs concurrents.
Cette tendance date de la fin du Covid au moment où les compagnies aériennes, obligées d’augmenter fortement leurs tarifs, de l’ordre de 30 %, se sont aperçues que cela ne changeait pas la demande de transport.
Il reste à faire encore quelques efforts pour regarnir des postes de travail supprimés pour faire la place au outils informatiques.
Le contact avec une machine voire un simple appareil téléphonique ne remplacera pas celui d’une personne physique.
Le stress des clients d’un certain âge, en particulier pour traverser les grandes plateformes aéroportuaires toujours plus gigantesques et complexes devient un frein à voyager pour des clients largement dégagés des contraintes financières.
Le transport aérien doit prendre soin de toutes ses clientèles et non pas certaines d’entre elles fussent-elles les plus nombreuses.
Après tout un consommateur peut avoir droit à certains égards, surtout s’il est prêt à les payer.
Jean-Louis Baroux
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