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Vers l’avion à mille places…

baroux-1 [1]Il est toujours intéressant de suivre les débats des conférences spécialisées dans le transport aérien.

Cela nourrit la réflexion.

Parmi les nombreux et très intéressants speakers du APG World Connect qui s’est tenu à Monaco du 29 au 31 octobre, j’ai retenu les interventions de Jean Christophe Victor le président du Think Tank LEPAC et producteur de l’émission : « Le dessous des cartes » sur Arte et de Richard Carcaillet qui dirige la stratégie marketing d’Airbus.

Je retiens de l’intervention du premier que nous allons inéluctablement vers un basculement du point focal de l’économie mondiale de l’Occident et même de l’Océan Pacifique vers l’Océan Indien.

Il s’appuie sur des données démographiques peu contestables. Celles-ci montrent une diminution progressive de la population chinoise, une stagnation des pays occidentaux et un fort développement de l’Inde et de l’Afrique. Mais ce n’est pas le plus intéressant de sa démonstration.

Jean Christophe Victor a étudié l’évolution des classes d’âge et des classes économiques. Et l’évolution est encore plus frappante. Alors que les pays occidentaux, y compris la Russie voient leur population vieillir, les pays riverains de l’Océan Indien, Inde, mais aussi Malaisie, Indonésie et Afrique de l’Est sont dans la situation inverse.

Dernier constat, les classes moyennes de ces pays seront très bientôt majoritaires dans le monde.

Or toutes ces évolutions très peu contestables, vont se produire d’ici à 2030. C’est-à-dire demain, ou plutôt aujourd’hui si on parle de construction aéronautique, et elles impacteront certainement le transport aérien.

C’est là qu’intervient Richard Carcaillet. Un peu poussé dans ses retranchements par Pierre Sparacco, il faut bien le dire, il a, certes encore un peu du bout des lèvres, annoncé qu’Airbus réfléchissait au développement d’un A 380 agrandi. A partir de là, il faut se livrer à quelques réflexions.

La configuration actuelle de ce magnifique appareil est en 3 classes : première, business et économie.

Cela lui donne une capacité située entre 514 et 540 sièges. Cela en fait d’ores et déjà le plus gros transporteur civil. Mais imaginons un équipement intérieur uniquement en sièges économie, comme c’est déjà le cas sur nombre de B 777 ou d’Airbus 330. La capacité passe alors aux alentours de 850 sièges.

C’est d’ailleurs ce qu’avait prévu Air Austral avant sa restructuration.

Mais si on parle d’une version allongée de l’appareil on arrive très naturellement au chiffre mythique de 1 000 sièges.

Reste une question : existe-t-il un marché pour ce type d’appareil qui serait alors deux fois plus gros que
le plus gros transporteur actuel ? Ce qui conduit à se poser une autre question : est-il possible de s’en passer ?

D’ici à 2030, le transport aérien aura doublé de volume, tout le monde est d’accord là-dessus. Mais ce doublement se fait sur un montant déjà considérable de passagers puisque nous sommes déjà au-dessus de 3 milliards de consommateurs.

Or, il est déjà très difficile d’écouler le trafic actuel, car finalement les clients veulent tous aller aux mêmes endroits. Certes on peut encore construire des aéroports en Chine, mais les projets se font dans la Chine intérieure et non plus dans l’est du pays, le plus urbanisé.

L’Europe ne dispose pratiquement plus de nouvelles capacités aéroportuaires, même en projet depuis que la grande plateforme londonienne envisagée à l’estuaire de la Tamise a été abandonnée.

Rien n’est prévu non plus aux Etats Unis, mais ces derniers ne devraient pas avoir un taux de croissance important.

Donc il faudra bien transporter deux fois plus de clients avec les mêmes infrastructures aéroportuaires, même si ici ou là, le Golfe par exemple quelques gigantesques aéroports sont en voie de construction.

Comment faire avec des pistes saturées ? On peut encore construire des terminaux, plus facilement que des pistes, mais cela ne résout pas tout.

Alors la solution revient inéluctablement dans l’agrandissement de la capacité d’emport des appareils, car on ne pourra pas doubler le nombre de mouvements, même avec des appareils plus silencieux.

Pour le moment la vente de l’A380 stagne, en attendant l’A380 Néo réclamé à cor et à cri par Emirates.

Mais celle-ci est déjà dans les cartons. Nul ne doute cependant qu’elle va reprendre.

Dans le fond, le mieux pour Airbus, serait que Boeing développe lui aussi un appareil de 1 000 sièges. Cela
entrainerait certainement le marché.

Jean-Louis BAROUX