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La relation client, un coût ou plutôt un investissement ?

Dans le tourisme, on parle beaucoup de la relation client et pourtant, chacun se débrouille à sa manière la plupart du temps. Tanguy de Laubier, le Pdg de Bluelink, ex Fréquence Plus Services, filiale d’Air France, nous explique pourquoi on hésite à se lancer dans des processus vraiment industriels et le potentiel de services innovants qu’on pourrait gagner à les utiliser…

 

La Quotidienne : En dehors de quelques grosses marques, vous avez peu de clients tourisme dans votre portefeuille ; pourquoi ?

Tanguy de Laubier : D’abord les marques n’ont pas envie de prendre des risques en externalisant leur data et leur relation client. Elles ont peur pour la qualité de leur service, et parfois avec raison : rappelez-vous l’expérience Jet Tours en Tunisie…

Et puis, elles ont peur de devenir « sourdes » en perdant le lien avec leurs clients, alors que dans les faits, elles ne sont souvent pas organisées pour écouter ce que leurs conseillers ont à leur dire. Et pourtant, les informations clients sont un trésor ! Le problème c’est qu’on s’endort facilement dessus ; il faut savoir les exploiter, avoir le temps, l’expertise et les outils. A cet égard, le potentiel est énorme, dans le tourisme ou ailleurs. Enfin, beaucoup d’entreprises pensent que la relation client est un coût ; elles font donc le choix d’un « sous-traitant », et non d’un partenaire, pour disposer de la solution la moins chère.

thierry de laubier_BlueLink_ [1]Pour vous donner une idée, les  marques à travers le monde dépensent 500 Mds $ en publicité quand elles n’en consacrent que 10 à la relation client.
Autrement dit, elles semblent, pour la majorité d’entre elles, accorder bien plus d’importance à la conquête et à la séduction qu’à la fidélisation de leurs clients. La Saint Valentin le 14 février, tout le monde connaît. La Saint Fidèle le 24 avril, tout le monde s’en fiche !

Vous voyez qu’il reste du chemin à faire ! En fait, il faut voir la relation client comme un véritable investissement. Dans un marché où les entreprises doivent à la fois se démarquer sans cesse et fidéliser leur clientèle, c’est sans doute le 1er vecteur de croissance et de profitabilité. Dans ce domaine, comme toujours, la qualité développe le marché et les marges.

A nous de rassurer les marques du tourisme et de les empêcher de devenir sourdes en leur remontant ce que disent leurs clients. Nos équipes gèrent plus de 1 000 contacts par mois, sur tous les supports possibles ; ça nous donne une certaine expertise, vous ne croyez pas ?

L. Q. : Comment les attirer ?

T. de L. : Dans le tourisme, pour la production comme pour la distribution, il y a de gros besoins, de la gestion des réservations et des réclamations jusqu’à l’assistance ou l’exploitation du CRM et l’optimisation de la fidélisation à travers le monde. Nous avons 4 métiers pour y répondre : le conseil, le data, la formation, et l’opérationnel qui recouvre le SAV, le marketing direct, les réservations, la veille 24h/24 etc.…

Prenons le cas du réceptif. C’est bien connu, nous avons le « plus beau pays du monde » ; incontestable, non ? Oui mais voilà : on n’a pas le service qui va avec. Dans notre métier, l’empathie et le service sont essentielles. De plus, nous travaillons avec des équipes multilingues, 28 pour être précis, car seul un interlocuteur qui parle sa langue maternelle peut rassurer un client.

De manière plus générale, il s’agit de créer une émotion qui attachera le client à la marque, par conséquent nous avons également des équipes entièrement dédiées à une enseigne.

L. Q. : Le tourisme compte beaucoup de petites entreprises. Vous pouvez aussi leur apporter des solutions adaptées à leur taille ?

T. de L. : La relation client, c’est 30 % d’outils et 70 de main-d’œuvre, mais on peut toujours mutualiser les coûts et faire dans la « dentelle » à l’intention des petits clients. Sur ce marché, les aléas sont nombreux ; l’actualité le montre mieux qu’un long discours. Il faut donc rassurer sans cesse les clients qui sont souvent pris entre plusieurs feux ; technique, juridique, administratif… De ce point de vue, nous pouvons aider ces nombreuses PME en leur prouvant qu’on peut faire mieux, plus vite et moins cher avec notre organisation industrielle.

L. Q. : Et les aider à innover, par exemple ?

T. de L. :. Si on traite bien le client, on peut aussi répondre à des démarches très différentes, c’est une évidence.
Techniquement, plus on le connaît, plus on peut aller vers ce qu’il aime et donc lui suggérer des tas de services que le TO ou le distributeur pourra agréger à son gré ou à la demande de son client. Sur ce plan, les opportunités d’innovations sont nombreuses…

Avec l’Euro 2016, par exemple, on peut parler du sport, mais il y en a d’autres dans tous les domaines, gastronomiques, culturel, événementiel, etc. On sait très bien repérer les goûts du client. Sur notre marché, il y a encore des progrès à faire sur les sujets liés au tracking. Mais il me semble que le plus important est de ne pas dépasser « le seuil d’intrusivité », sinon on devient agaçant.

En 10 ans, nous avons multiplié par 5 l’activité du groupe BlueLink ; grâce, nous en sommes persuadés, à l’importance que nous accordons aux 4 valeurs humaines qui animent nos équipes : l’empathie, la diversité, l’intelligence collective et l’audace. Elles constituent notre ADN et c’est cet ADN qui nous permet d’être les ambassadeurs des marques auprès de leurs clients, d’imaginer avec elles leur relation client de demain tout en construisant des Business Models motivants pour nous et sources de valeur pour les entreprises et leurs clients.

Propos recueillis par Bertrand Figuier