Décidément il faut avoir les reins solides pour créer une compagnie aérienne. Plus on avance dans la technologie, plus la sécurité devient parfaite, plus la consommation de carburant diminue, plus au fond le transport aérien devient un modèle pour le futur de la planète et plus il est attaqué. Et dans cet ensemble, les transporteurs, ceux qui finalement prennent tous les risques, sont les plus impactés par les attaques contre ce secteur d’activité.
Pendant des décennies l’aérien civil a été le chouchou des gouvernements. Ceux-ci ont largement aidé leurs compagnies nationales à se développer à coups de protections de tous ordres et d’injections d’argent massives.
Ils le faisaient car ils y trouvaient leur compte. Une compagnie importante était l’image du pays et participait largement à son rayonnement politique mais également à son développement économique.
Cette fructueuse collaboration a permis à la fois la création du transport aérien moderne lequel a été l’un des principaux moteurs de la croissance mondiale en favorisant les échanges.
Et puis, depuis peu de temps, disons moins de dix ans, la perception du transport aérien par les autorités politiques a changé.
Il faut dire, à leur décharge que le secteur n’a pas été exempt d’excès en particulier car il n’est pas arrivé à intégrer de manière tranquille l’arrivée du modèle « low cost ».
Au lieu de l’accepter comme un moyen pratique de développer une nouvelle clientèle, les transporteurs traditionnels n’ont eu d’autre but que de concurrencer les nouveaux entrants alors qu’ils auraient beaucoup mieux fait de coopérer avec eux.
C’est ainsi que s’est enclenchée la désastreuse guerre des prix.
Les tarifs d’appel, pour le moins insensés, ont été copiés y compris par les compagnies traditionnelles et les clients se sont précipités pour voyager pour un oui ou un non, car c’est tout de même comme cela que la liberté s’exerce. Alors s’est développé le « sur-tourisme ».
Et à partir de ce moment-là la légitimité du transport aérien a été mise en cause. Il est devenu l’emblème de la destruction de la planète alors que c’est totalement faux.
Sauf que l’on constate quand même bien les effets d’une certaine surconsommation.
Dès lors il était facile de montrer du doigt ce moyen de transport en pleine croissance mais dont les effets pouvaient entrainer de regrettables désordres.
La « honte de voyager » a commencé à s’immiscer dans les esprits et les gouvernements en ont profité pour prendre des mesures de limitation administratives, et à lever des taxes dont la destination était non pas consacrée à la recherche pour encore plus décarboner le
transport aérien, mais à soutenir son concurrent, la voie ferrée, qui n’a jamais pu se financer toute seule.
Et maintenant un nouveau danger guette cette activité.
Il s’agit de l’utilisation de drones pour perturber l’espace aérien autour des grands aéroports. Ainsi le transport aérien européen est devenu une nouvelle cible dans la guerre que se livrent la Russie et l’Ukraine.
Elle est facile, peu défendue, et un seul drone peut non seulement obliger la fermeture temporaire d’un grand aéroport, mais aussi
bouleverser ainsi l’exploitation des compagnies car il suffit qu’un seul « hub » soit menacé pour perturber une exploitation toute entière.
De plus l’impact médiatique est immédiatement très important.
Au fond le transport aérien va maintenant devenir la cible de tous les mécontents.
Les écologistes en ont fait leur cible principale, les gouvernements ont trouvé une mine pour équilibrer leur budget et les militaires s’en servent pour régler leurs différends.
Au lieu de s’attaquer aux questions de fond, il
devient plus pratique et certainement plus simple de pointer le transport aérien même si, au fond d’eux-mêmes les gouvernants ont bien conscience que ce n’est pas la solution.
Mais c’est un secteur d’activité à la fois médiatique et populaire car une majorité de votants ne sont toujours pas utilisateurs de ce mode de transport.
Au milieu de cela certaines compagnies continuent à tirer leur épingle du jeu, même sil elles sont également soumises à de fortes contraintes géopolitiques.
Emirates, pour n’en nommer qu’une, vient de réaliser un résultat historique : 3,3 milliards de dollars de bénéfice sur un seul trimestre.
Voilà qui peut ramener un certain optimisme dans cette activité si décriée et on se demande pourquoi. Et de l’optimisme, on en aura bien besoin.
Jean-Louis Baroux