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Goodwin Sands ou l’aéroport du futur

baroux-1 [1]Les chiffres sont implacables, le transport aérien double de volume tous les 12 ans et de chiffre d’affaires tous les 10 ans, et les analystes pensent qu’il n’y a aucune raison prévisible pour que cela s’arrête, sauf à décourager les passagers en leur infligeant des contraintes qu’ils pourraient juger insupportables.
A cet égard les principales difficultés se trouvent à la jonction entre le mode de transport terrestre et le mode aérien, c’est-à-dire les aéroports. Et on voit bien que c’est le lieu où se concentrent les difficultés.

Voilà bien où se trouve la limite de la croissance du transport aérien. Il est urgent d’envisager d’autres modes aéroportuaires si l’on ne veut pas donner un coup de frein à l’expansion de ce secteur d’activité. De quoi parle-t-on, au fond ? Il s’agit ni plus ni moins de que traiter 3 milliards de passagers supplémentaires d’ici à 2025, c’est-à-dire que la croissance sera équivalente au volume actuel. Or cette croissance va se concentrer sur les très grandes plateformes. Il y a en effet peu de chances que les aéroports secondaires soient prisés par les compagnies et les clients. Donc on parle non pas de milliers ni même de centaines d’aéroports, mais de quelques dizaines.

Dans le futur un aéroport de standing international devra traiter au moins 100 millions de passagers annuellement, c’est-à-dire plus que le plus gros des aéroports actuels : Atlanta ou Chicago O’Hare. Pour fixer quelques idées, le plus gros aéroport européen : Roissy Charles de Gaulle traite aux alentours de 70 millions de passagers et on voit bien toutes les difficultés de l’exercice. Alors il faudra bien trouver des solutions. Roissy Charles de Gaulle peut monter au-delà de 100 millions de passagers à la condition de construire, enfin pourrait-on dire, un grand terminal digne de ce nom.
Il y a assez de place dans l’emprise aéroportuaire, mais c’est un exemple unique en Europe. Les plateformes londoniennes sont totalement saturées : Gatwick, par exemple traite plus de passagers qu’Orly avec une seule piste et Heathrow ne peut plus s’étendre et devra rester confiné à deux pistes. La situation en Allemagne n’est pas très brillante non plus, particulièrement à Francfort et les autres aéroports européens n’ont pas de grandes perspectives d’extension à la notable exception des deux grands aéroports espagnols : Madrid et Barcelone.

Dans le même temps, Dubaï a mis en chantier son nouvel aéroport conçu pour … 120 millions de passagers. Tout comme son compère Tim Clark, l’emblématique Président d’Emirates, Paul Griffiths le patron des aéroports de Dubaï a une vision large. Il faut dire que le Cheikh Al Maktoub le propriétaire de la compagnie et de l’aéroport s’entend à merveille avec ces deux-là. Donc pour le moment, le Golfe va encore accentuer son avance. Les européens devront répondre sauf à perdre leur position dans ce domaine.

La solution vient peut-être du projet Goodwin Sands. Comme son nom l’indique, Goodwin Sands est un banc de sable situé au sud de l’estuaire de la Tamise.
Pour le moment il représente un vrai inconvénient pour la circulation maritime, mais ce qui est pour le moment une difficulté peut être transformé en réelle opportunité.
Le cabinet d’architectes Beckett Rankine, spécialisé dans les constructions sur sites maritimes a monté le projet de transformer ce banc de sable en un tout nouveau et immense aéroport.

Il s’agit ni plus ni moins que de transformer ce banc de sable en une île stable pour héberger un aéroport comportant 4 pistes, plusieurs terminaux avec une capacité de traitement de l’ordre de 100 millions de passagers. Ce projet est gigantesque : pas moins de 45 milliards d’€ seront nécessaires et les  difficultés techniques sont immenses. Seulement si le projet voit le jour, et on ne voit pas vraiment pourquoi ce ne serait pas le cas, la Grande Bretagne disposera enfin d’un aéroport sans contrainte. Pas de populations riveraines, donc pas de nuisances sonores, et par conséquent une capacité opérationnelle de 24 heures sur 24. La liaison rapide avec le centre de Londres en utilisant pour l’essentiel la voie TGV déjà construite, permettra de rejoindre le centre de Londres en 40 minutes, soit sensiblement moins que le temps nécessaire pour relier Roissy à Paris.

On connait par le monde au moins trois exemples de grands »aéroports iles » : Incheon en Corée du Sud, Kansai au Japon et Hong Kong. Tout cela marche très bien à la condition de créer les bonnes liaisons avec les villes.

Ce modèle d’aéroport est sans doute le seul à permettre de supporter le développement du trafic aérien.

Jean-Louis BAROUX