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Et si la faillite de Thomas Cook était une bonne nouvelle pour toute la profession ? par JL Dufrenne

Comme des milliers d’agents de voyages en France, je tente de comprendre et analyser le nouveau bouleversement que vit notre profession depuis quelques mois. Le constat tout d’abord : la dégringolade de Thomas Cook n’était elle pas écrite ?

A force de répéter que la croissance, à vitesse forcée, de ces géants du tourisme ne s’accompagnait pas , ou très peu, d’une logique d’optimisation des process en back office…

A force de répéter , que pour le marché français, il était inconcevable de racheter des marques à forte notoriété pour les absorber ensuite derrière un cœur voire un sourire…

A force de répéter que la volonté de maîtriser l’ensemble de la chaîne : de l’agence à l’hôtel en passant par l’aérien et les services terrestres nécessitait de lourds investissements et cette fameuse « intégration verticale » manquait d’agilité pour le client dont le choix est rarement celui qu’on veut lui imposer.

A force de répéter que le marché français demeure une spécificité et que ce qui fonctionne là-bas peut ne pas fonctionner ici.

A force de répéter que ce qui compte avant tout, dans nos métiers, est la mise en valeur des vendeurs, des bons vendeurs et qu’il est coûteux et souvent peu productif de nommer au dessus d’eux pléthore de managers qui pilotent, contrôlent , scrutent les objectifs et dont l’efficacité reste à prouver
Nous arrivons donc à une situation que beaucoup parmi nous avait pressenti sans jamais espérer qu’elle survienne. C’est ainsi.

La situation à ce jour : une profession solidaire

On a pu entendre s’élever quelques voix sur le raz de marée prévisible engendré par cette faillite : la réalité est toute autre.

L’APST, tout d’abord, qui a parfaitement assumé sa mission (et qui continue de le faire) Et même si la situation de l’association s’en trouve fragilisée, l’ensemble de la profession ne peut que se féliciter de l’image renvoyée auprès du grand public : « les agences de voyages ne vous laissent pas tomber ! »

Quant à L’offre collective de reprise de Thomas Cook France validée ce 28 novembre, elle est remarquable à plus d’un titre et devrait, à mon sens, faire « jurisprudence » pour de futures situations de faillite tous domaines d’activités confondus.

En effet, qu’un groupement d’entreprises, concurrentes par définition, ait pu habilement se coordonner pour reprendre un maximum de points de vente et de salariés selon une pertinente répartition est une très bonne chose. Elles ont d’ailleurs toutes à y gagner car on sait tous que la plus grande valeur de ces points de vente émane des salariés qui les composent et dont l’expérience et le portefeuille en sont les réelles richesses. Il y a cependant urgence à « relancer la machine » car ces deux derniers mois de flottement peuvent entraîner une fuite importante de clients.

Encore plus réjouissant, le profil des repreneurs : des entreprises françaises, (cocorico) qui maîtrisent parfaitement leur métier et leur clientèle et qui devraient rapidement faire fructifier ces rachats.

On sait qu’elles accorderont pleine confiance à leurs vendeurs pour vendre, en priorité, ce que les clients veulent.

Bien entendu, ces producteurs/distributeurs veilleront à ce que leurs productions soient sérieusement mises en avant mais ne l’érigeront pas en tant que dogme car ils ont bien compris que les points de vente aujourd’hui doivent fournir expertise et exhaustivité de l’offre.

Il y a donc fort à parier que, si tout ceci se met en place rapidement, le paysage renouvelé de ces agences devrait s’en trouver conforté et promis à un avenir serein.
C’est nécessairement une combinaison de revente de ces produits « maison », des TO « tiers » et de produits à la carte, émanant de fournisseurs multiples (connus, référencés.. ou pas) qui permettra à tous ces points de vente d’accéder à la rentabilité.

Le client a changé, il demande aujourd’hui à son conseiller-voyage un maximum d’agilité, fruit d’une offre de plus en plus dense dont il a parfaitement connaissance. Si le conseiller ne lui apporte pas cette agilité, il perd en crédibilité ou il perd le client, tout simplement.

Toute agence de voyages qui affiche aujourd’hui de bons résultats sait bien cela : la rentabilité ne peut être obtenue qu’en s’imposant un référencement « fermé ». Les chiffres parlent d’eux-même : dans un réseau incontournable,, que je connais un peu, la centralisation des paiements en « tourisme » doit représenter entre 50 et 60 % de ce que génère effectivement le réseau dans son ensemble .

Plutôt que de s’en attrister, il serait pertinent que les producteurs s’intéressent à toute cette part de chiffre d’affaires qui leur échappe : il y aurait probablement là une formidable croissance à opérer, chacun dans sa spécialité.

Mais nous nous égarons un peu…..

Je ne peux conclure cette modeste réflexion sans distiller une pensée positive pour les salariés TC restés à ce jour sur le bord de la route ! j’en connais plusieurs et pense pouvoir affirmer qu’ils se ressemblent beaucoup : des agents de voyages passionnés, efficaces, impliqués, ayant acquis une connaissance remarquable dans la distribution ou la production.

Que vous ayez un poste précédemment au service groupe, TO ou en agence, votre expertise a une réelle valeur : c’est votre « fond de commerce personnel ».
Il suscitera inévitablement l’intérêt de beaucoup de patrons d’agences, de TO qui aujourd’hui recherchent ces réelles compétences. Sachez vous vendre ! Diffusez, par tous les moyens de communication, votre candidature.

Et si l’idée vous « titille » de voler de vos propres ailes, il n’est pas si difficile que cela aujourd’hui de créer sa propre structure à moindres frais : contactez pour cela le représentant APST ou des Entreprises du Voyage de votre secteur : il saura vous aiguiller !

Et si cette faillite avait pu mettre en relief la remarquable solidarité de cette profession ?
Excellente journée.

Jean-Luc Dufrenne