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Les compagnies aériennes Low cost sont-elles en péril ?

Le modèle Low Cost est non seulement arrivé à maturité, mais il semble bien avoir atteint ses limites. Il a eu et il a encore toujours une énorme utilité pour le transport aérien : il amène une nouvelle clientèle que les compagnies traditionnelles sont incapables de capter. Sauf que pour attirer ce nouveau marché, il a fallu faire quelques contorsions avec les affichages de tarifs.

Je viens de faire une petite expérience en allant sur le site EasyJet. J’ai cherché un vol Paris (Orly) –Berlin (Schoenefeld) aller le 19 octobre avec un retour le 20. Premier constat, tout est clair, il suffit de suivre les flèches. On ne pourra pas dire que les clients ne soient pas informés.

Le prix le moins cher pour ce trajet est de 39,62 € à l’aller et de 31,80 € au retour soit 71,42 € pourbaroux-1 [1] l’aller-retour, ce qui, on en conviendra est très raisonnable, voire, pas cher du tout. Le prix le plus élevé pour ce même aller-retour est de 114,84 €, là encore, rien à dire.

Bon, il est clair que ces tarifs ne permettent pas d’assurer la rentabilité de la compagnie, dont je rappelle qu’elle a dégagé un profit net de 548 millions de livres en 2015 pour un chiffre d’affaires de 4.686 millions de livres soit un taux de résultat net de 12 %. Je connais beaucoup de transporteurs envieux d’un tel ratio.

Donc, pour arriver à cet excellent chiffre, il faut autre chose que du transport sec, même si EasyJet a atteint le formidable coefficient de remplissage de 91,50 % en 2015 en progression de plus de 5 points par rapport à 2005.


easy-jet

 

 

 

 

 

C’est là que l’on rentre dans les fameux « ancilliary services », autrement dit les services de complément. Alors toujours pour ce même trajet, vous pouvez ajouter le choix de votre siège : 13,12 € par vol si vous voyagez entre les rangées 2 et 6, 43,33 € si vous avez un bagage en soute, 19,68 € pour une assurance annulation et 13,38 € pour une assurance « vol manqué ».

Le montant des services complémentaires ressort alors à 102,63 €, soit plus cher que le tarif d’appel et presque au même prix que le tarif le plus élevé.

Mais l’affaire ne s’arrête pas là. Avant de compléter votre dossier, le site vous invite à acheter une nuit d’hôtel, allez, ne soyons pas mesquins et prenons un bon établissement proposé au prix de 179 € et puis tant qu’on y est, une voiture de location à 63 €. Je ne connais pas la commission que touche la compagnie sur ces transactions, mais il serait surprenant qu’elle soit inférieure à 20 %. Voilà encore 48,40 € de gagnés.

flyscoot [2]Tout bien compté, les services complémentaires rapportent sur ce trajet 151,03 € soit plus de deux fois le prix d’appel. Il faudra bien entendu rajouter à cette recette les marges réalisées sur les ventes à bord.

Vous me direz que toutes les compagnies n’ont qu’à en faire autant et que les mêmes recettes entraînent les mêmes résultats. Je suis cependant un peu gêné de constater que pour privilégier les recettes complémentaires la compagnie, comme d’ailleurs les autres « Low Costs » ont volontairement dégradé le produit de base.

D’abord la densité des sièges. Tous les clients constatent que les rangées, surtout celles de l’arrière sont beaucoup trop rapprochées. Cela a d’ailleurs deux avantages pour la compagnie : elle met plus de passagers et elle peut vendre ses suppléments pour être assis un peu plus confortablement à l’avant.

ryanair [3]Ensuite les procédures d’embarquement : afin d’accélérer les rotations des appareils, il faut embarquer les clients le plus vite possible. C’est ainsi que les portes d’embarquement ferment au moins 10 minutes avant la fermeture des portes de l’avion et que les passagers sont priés de faire la queue dans la passerelle en attendant que l’appareil soit prêt à les accueillir et ce même pour les

clients qui ont acheté le fameux « speedy boarding ». Et puis, quoi qu’on en dise, la ponctualité n’est pas toujours respectée surtout pour les vols de fin de journée. Certes tout n’est pas toujours de la faute de la compagnie, mais pour faire les 8 vols quotidiens, il faut prévoir des horaires très tendus, pratiquement impossibles à tenir. Tous les clients en ont fait l’expérience.

Mais par contre si la compagnie est en retard et si les retards sont supérieurs à 3 heures, les clients auront toutes les peines du monde à obtenir les compensations prévues par la règlementation européenne.

Bref, le « Low Cost » porte encore bien son nom. Mais EasyJet s’attaque maintenant à la clientèle affaires et pour cela le transporteur britannique se fend d’une brochure envoyée aux utilisateurs fréquents.

Je note d’abord que ceux-ci n’ont rien réclamé et qu’ils apprennent qu’ils sont mis sur un fichier d’adhérents au « Flight Club » censé leur procurer des avantages dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils sont très modestes, je vous en passe les détails. Rien par exemple sur la facilité des procédures d’indemnisation pour retard au-delà de 3 heures.

Les compagnies « Low Cost » vont avoir du chemin à faire pour se mettre au niveau des transporteurs traditionnels, tout comme ces derniers ont du pain sur la planche pour converger vers le modèle « Low Cost » dont ils admirent les résultats.

On suivra avec attention les démarches des uns et des autres pour arriver au modèle hybride vers lequel va le transport aérien.

Jean-Louis Baroux