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Aérien, des turbulences sans gravité ?

Comme tous les ans, le printemps voit l’annonce des résultats des compagnies aériennes, de nouvelles grèves, et le lancement de nouveaux projets. Faisons un petit point.

Les grèves

baroux-1 [1]On ne peut décidément pas y échapper en France. Dès que les beaux jours arrivent les grèves se déclenchent pour des motifs dont on chercherait en vain l’intérêt. C’est ainsi que nous avons eu droit au traditionnel arrêt de travail des contrôleurs aériens. A vrai dire, je n’ai pas saisi la raison de cette première grève annuelle. Ce que je sais, c’est qu’elle a gravement perturbé le trafic.

La grève est un droit important et une arme redoutable. Elle ne doit être maniée que dans le cas où il est impossible de régler par l’amiable un fort différent dans les règles du travail. Est-ce le cas pour les contrôleurs aériens ? Ces derniers réclament des effectifs supplémentaires alors qu’ils ont et de loin la plus faible productivité des pays développés. Ou bien est-ce tout simplement pour se maintenir en forme ?

Je note d’ailleurs que l’annonce de la création d’une « low cost » long courrier dans le Groupe Dubreuil a déclenché tout aussi mécaniquement une grève chez Air Caraïbes. Au lieu de voir dans cette initiative le maintien du développement de leur entreprise, les grévistes, au nom de je ne sais quelle égalité de droits, s’acharnent à faire échouer ce qui est leur avenir.

Les résultats

L’année 2015 s’avère être un grand cru pour le transport aérien avec un profit cumulé de plus de 30 milliards de dollars, rien que pour les compagnies IATA. C’est 4 fois le résultat de l’année précédente et un niveau jamais atteint. Sauf que ce profit représente encore moins de 5 % du chiffre d’affaires ce qui suffit à peine à financer les capitaux investis.

Tous les grands transporteurs en ont bénéficié au premier rang desquels notre compagnie nationale.

Oui, mais ce résultat est tout de même un peu en trompe l’œil. Air France est passée certes en profit, mais de manière modeste alors que son concurrent allemand, en dépit de conflits sociaux durs, affiche un bénéfice historique de 1,7 milliards d’€.
Deux raisons essentielles à ces bons résultats : d’abord une restructuration qui commence sérieusement à porter ses fruits et puis la baisse considérable du prix du carburant. Je note d’ailleurs que les plus grands bénéficiaires de l’effondrement du prix du pétrole sont les transporteurs qui ne se sont pas livrés aux spéculations à long terme sur le cours du baril. Si le groupe Air France/KLM n’avait pas été encore plombé par des achats de carburant « sécurisés », son résultat aurait largement dépassé le milliard d’€.

Les travaux aéroportuaires

On apprend que même les Emirats doivent compter sur les passagers pour financer leurs aéroports.

C’est le cas de Dubaï qui mettra ses passagers à contribution pour financer la gigantesque plateforme aéroportuaire qui est en train de se créer. Certes la taxe sera modeste : de l’ordre de 9€ par passager mais le volume de trafic est très important et les sommes ainsi récoltées seront significatives. Encore faut-il savoir si les passagers en transit, qui représentent tout de même les 2/3 des clients, seront taxés ou non.

Atlanta se lance aussi dans un programme de travaux très conséquent. Il s’agit ni plus ni moins que de rajouter 20 % de capacité à ce qui est encore la plus grande plateforme aéronautique mondiale.

Garder la première place, voilà un challenge qui vaut bien quelques investissements.

En France, nous avons les grands travaux à Orly. Ceux-ci sont largement entamés. Une fois terminés, ils agrandiront notablement les capacités de ce qui est encore l’aéroport parisien le plus pratique. Et puis il bénéficiera des infrastructures du Grand Paris avec enfin une desserte RER convenable. Bref, il pourra facilement traiter 40 millions de passagers. Sauf que, si rien ne change, il sera toujours bloqué par le plafond de 250.000 mouvements décidé en 1994, c’est-à-dire, il y a plus de trente ans. Comme si pendant ce temps le transport aérien n’avait pas évolué.

Alors on ressort le troisième aéroport parisien qui serait maintenant envisagé en pleine Beauce, au sud de Pithiviers. Lorsqu’on voit que nous n’avons pas été capables de relier convenablement Roissy à Orly et que le projet du Roissy Express n’est prévu qu’à l’horizon 2024 et encore pour relier Charles de Gaulle à la gare de l’Est et non pas la gare du Nord où il y a déjà toutes les interconnexions, on ne peut être que dubitatif face au 3ème aéroport parisien.

Jean-Louis BAROUX