Le tourisme, combien de divisions ?


Dans l’affaire qui agite le tourisme ces jours-ci autour de l’arrêté gouvernemental sur la garantie minimale, savoir qui ment importe peu.

Chacun a son point de vue, et je ne suis pas policier…

En revanche ce que nous dit la situation actuelle est très simple. Qu’il y ait eu concertation ou pas, le résultat est le même : la profession coure encore une fois après un train qu’elle n’a pas vu venir.

Elle est probablement restée sur le bilan des Assises, un grand moment d’espérance consensuelle, si je me souviens bien.

Elle est surtout restée bloquée sur un diagnostique qui s’obstine à voir dans la crise qu’elle traverse des causes conjoncturelles quand il s’agit plutôt d’évolutions structurelles.

Pour avoir une idée des dégâts qu’occasionne cet entêtement, reportez-vous aux chiffres annoncés par Raoul Nabet, à savoir que, depuis son arrivée à la Présidence de l’APST, le montant annuel moyen des sinistres était passé de 2 à 5 M € !

Si pour des intérêts d’égo individuel ou de court terme collectif, la profession préfère remettre au lendemain la réflexion et les mesures qu’il fallait sans doute prendre dès 2009, le gouvernement, lui, n’a pas envie de tergiverser.

Sans hésiter une seule seconde, il est intervenu dans le modèle économique des agences et des TO, alourdissant leurs charges fixes alors que leurs recettes potentielles se dégradent structurellement.

Une vraie brute, ce gouvernement ? Non, pour lui, c’est juste une question d’organisation…

Ardent artisan de cette situation économique, il sait parfaitement ce qu’il en est de la santé économique des entreprises en général.

Sur les 63 400 sociétés qui ont disparu en 2014, il sait que les petits commerces et l’hébergement-restauration fournissent le gros du bataillon dont les PME représentent déjà 21 %.

Pour 2015, il prévoit une tendance équivalente et ne songe qu’à anticiper tout de suite la croissance de sinistres.

Connaissant la légendaire fragilité financière des agences et des TO, il préfère donc se couvrir face aux associations de consommateurs qui ne manqueront pas de crier au scandale si un groupiste ou un TO important venait à s’effondrer en laissant sur le carreau plusieurs centaines de clients.

Il en profite aussi pour se couvrir contre Bruxelles en se mettant vite au diapason des directives européennes (voir nos articles du 3 et 4 octobre) ; avec le lac Sivens et son déficit budgétaire, il est déjà dans le collimateur de la Commission… pas la peine d’en rajouter.

En fait, dans cette affaire, le gouvernement fait même un joli coup double : cette décision le met à l’abri sans surcoût particulier pour son budget, tandis qu’elle rend un bon service aux organismes financiers spécialisés dans le tourisme.

Comme le gouvernement, ceux-ci s’attendent en effet à l’augmentation des défaillances ; faites-leur confiance, ils ont déjà calculé ce que leur coûterait un remboursement total et rapide des fonds déposés par les clients.

La décision du gouvernement arrive donc à point nommé. En elle-même, elle ne change rien aux risques à couvrir ; en revanche, en cas de faillite lourde, elle élève largement le seuil à partir duquel ils en seront réellement de leurs poches.

Elle leur permet aussi d’appuyer le calcul des primes sur un montant de garantie plus important ; y a pas de petites économies… Et pour finir, elle facilite également leur prospection commerciale en rendant mécaniquement l’APST moins compétitive.

Pour réagir efficacement à cette situation, à défaut de la prévenir, il faudrait que la profession et ses institutions jouissent d’un minimum de rapport de force face aux autorités publiques.

Le tourisme ! Combien de divisions ?

Hélas, zéro. On le sait clairement désormais : la profession n’a pas le moindre poids politique.

Et les débats publics récurrents sur la pertinence de l’APST, ou les disputes bruyantes sur la réalité d’une concertation préalable à l’annonce gouvernementale, ne l’ont certainement pas renforcée.

D’ailleurs, je me demande même dans quelle mesure les départs spectaculaires de certaines entreprises n’ont pas distillé au sein du gouvernement l’idée que l’APST pouvait fort bien disparaître et qu’il serait prudent se prémunir contre cette éventualité.

Or l’occasion fait souvent le larron…

Mais c’est vrai : Fabius, les Assises, le tourisme, une priorité… Rappelez-vous : ravis, nous avons regardé le doigt ; il fallait voir la lune…

Bertrand Figuier





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