Action de groupe, le mécanisme de la loi et les risques


Conseillère et intervenante pour un grand TO français, Maître Malazdra nous apporte son éclairage sur ce sujet. Elle sera désormais disponible pour répondre à vos questions sur laquotidienne.fr (redaction@laquotidienne.fr).

Nathalie MalazdraLa loi n°2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation et son décret d’application n°2014-1081 du 24 septembre 2014 ont introduit l’action de groupe en droit français en créant un mécanisme original, entré en vigueur le 1er Octobre 2014, se distinguant de la class action américaine.

Quel est ce mécanisme ? Les professionnels du tourisme peuvent-ils être concernés par les actions de groupe ?

Différents dispositifs de notre droit permettaient déjà aux associations de consommateurs d’agir pour la défense des intérêts des consommateurs. Mais aucun dispositif ne permettait jusqu’alors aux consommateurs de bénéficier individuellement des sommes dues en réparation du préjudice subi.

Aujourd’hui, un groupe se composant de deux consommateurs minimum et estimant avoir subi un préjudice résultant d’une cause commune et identique, soit du même manquement d’un professionnel, peut être à l’origine d’une action de groupe.

Le consommateur est défini par la Loi comme une « personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ».

Tout client des agences de voyages ou des compagnies aériennes est concerné, les personnes morales étant clairement exclues du dispositif.

Les consommateurs ne pourront cependant pas saisir eux-mêmes le Tribunal.

Pour la mise en œuvre d’une action de groupe, les consommateurs victimes doivent en effet obligatoirement saisir une association agréée en signalant le manquement commis par le professionnel.

Quinze associations sont aujourd’hui agréées.

Si elle estime la réclamation des consommateurs fondée, l’association saisira alors le Tribunal de Grande Instance par le biais de son avocat et se chargera du suivi de la procédure jusqu’à l’obtention des sommes pour les consommateurs concernés.

Le Tribunal saisi décidera si le principe de la responsabilité du professionnel concerné doit être retenu.

Si cette responsabilité est reconnue, le Tribunal déterminera le groupe de consommateurs à indemniser, fixera le montant de l’indemnisation ou les éléments de son évaluation et déterminera les mesures de publicité à mettre en œuvre et destinées aux consommateurs pouvant être potentiellement concernés par l’action.

Enfin, le consommateur devra se manifester dans le temps imparti par le Juge pour le paiement de son indemnisation.

Les litiges visés sont ceux découlant de la conclusion de contrats de consommation portant sur des biens et des services.
Les activités des tours opérateurs, des agences de voyage et des compagnies aériennes sont donc directement concernées.

L’un des objectifs très clair du dispositif est de permettre l’indemnisation des petits litiges échappant aujourd’hui à la justice, le coût d’une action judiciaire dépassant bien souvent le montant du préjudice subi par les consommateurs.

L’action de groupe étant néanmoins limitée à la réparation des préjudices patrimoniaux résultant des dommages matériels subis par les consommateurs, certaines actions ne pourront faire l’objet d’une action de groupe.

Ainsi, aucune action de groupe ne pourra être intentée aujourd’hui pour la réparation des préjudices corporels à la suite d’un crash aérien.

De la même façon, la réparation d’un préjudice moral ne pourra pas être intentée collectivement. Sont ainsi exclues les actions visant à la réparation des préjudices résultant de la violation du droit au respect de la vie privée, du droit à l’image…

Les préjudices matériels liés aux retards d’avion pourraient quant à eux être très largement visés par les actions de groupe.

Leur responsabilité en cas de retard d’avion étant reconnue en l’état du droit positif, les agences de voyage pourraient être visées directement par une action de groupe.

Les consommateurs pourraient en effet décider d’aller au plus simple en agissant directement contre leur co-contractant, soit leur agence de voyage, à charge pour elle comme dans le cadre d’une action individuelle de se retourner contre le responsable du dommage.

Les interventions successives ou en coopération de plusieurs compagnies aériennes au cours d’un voyage et les difficultés qui pourraient en découler pour identifier le responsable du préjudice subi pourrait également inciter les consommateurs à n’agir que contre leur agence de voyage.

Seule une question de solvabilité dans l’hypothèse de préjudices importants à indemniser pourrait conduire les associations de consommateurs à agir directement contre la ou les compagnies aériennes.

Une médiation entre l’association de consommateurs et le professionnel concerné sera toujours possible une fois le Tribunal saisi et pourrait permettre au professionnel d’éviter l’aléa judiciaire quant à la fixation de l’indemnisation.

Enfin, il est important de signaler que l’insertion d’une clause dans les contrats prévoyant l’interdiction du client à participer à une action de groupe n’aura aucune valeur juridique et sera réputée non écrite.

Maître Nathalie Malazdra,
Avocat à la cour.





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